Article paru dans La Tribune | 10/02/2015 | Christine Lejoux

 

La plateforme toulousaine de « crowdequity » Wiseed a annoncé le 4 février un partenariat avec le Crédit Coopératif. Banques et acteurs du financement participatif multiplient les associations.

« Ce partenariat va nous apporter des projets en recherche de fonds, auxquels la banque ne peut pas répondre. Axés sur le développement durable, l’économie responsable, ce qui correspond bien à notre positionnement, ces projets auront été examinés par le Crédit Coopératif, ce qui est un gage de sécurité pour nous »,

explique Stéphanie Savel, présidente de Wiseed.

« Le Crédit Coopératif est convaincu par la finance participative. Nous devons fournir ce service à nos clients, qui peuvent avoir besoin de fonds propres alors que notre métier ne consiste pas à apporter des fonds propres, mais à accorder principalement des prêts. Notre partenariat avec Wiseed nous permettra de répondre à ce besoin et de le proposer à notre écosystème de partenaires »,

complète Erwan Audouit, responsable des partenariats, de la recherche et du développement au Crédit Coopératif.

Démultiplier la force de frappe du crowdfunding

Ainsi, dans le domaine du commerce associé, par exemple, le Crédit Coopératif pourra orienter vers Wiseed un entrepreneur qui aura besoin d’un apport en capitaux propres de l’ordre de 80.000 euros pour ouvrir un magasin Biocoop. Parallèlement, le Crédit Coopératif pourra diriger vers Wiseed certains de ses clients qui ont réussi dans le domaine du commerce associé, et qui sont donc susceptibles de financer à leur tour des prétendants à l’ouverture de magasins. De quoi démultiplier la force de frappe de Wiseed, qui a déjà permis à des start-up de collecter un total de 15 millions d’euros environ depuis son lancement en 2008. Et ce, d’autant plus que « le Crédit Coopératif peut avoir des clients particuliers intéressés par l’investissement dans des start-up, ce qui élargira (encore) notre base d’investisseurs », poursuit Stéphanie Savel. « Grâce à ce partenariat, nos collaborateurs pourront proposer à leurs clients particuliers la finance participative comme solution de placement », confirme Erwan Audouit.

Un partenariat gagnant-gagnant, donc, à l’image de celui conclu le 21 janvier entre Groupama Banque et la plateforme de « crowdlending » Unilend, spécialisée dans le prêt aux PME et aux TPE par des particuliers. Dans le cadre de cet accord, la filiale bancaire de l’assureur Groupama prêtera aux petites et moyennes entreprises 100 millions d’euros, sur les quatre prochaines années. Concrètement, Groupama Banque souscrira à des demandes de crédit au côté des épargnants-prêteurs, sans que sa participation dépasse 20% du montant du crédit, afin de ne pas dénaturer le concept de « financement par la foule. » Comme Wiseed avec le Crédit Coopératif, son partenariat avec Groupama Banque va donner un coup d’accélérateur à la puissance de financement d’Unilend, qui, en un an d’existence seulement, a déjà permis à quelque 90 PME d’emprunter près de 8 millions d’euros auprès de 3.500 particuliers.

Des partenariats aux modèles très divers

Si les partenariats entre banques et acteurs du crowdfunding se suivent, ils ne se ressemblent pas, en revanche. Partenaires de la plateforme de crowdfunding solidaire Spear, le Crédit Coopératif, le Crédit municipal de Paris, BNP Paribas et la Société générale assument le risque des prêts consentis par les épargnants à des porteurs de projets sociaux et solidaires. Un modèle qui n’est pas le même que celui de l’accord Unilend-Groupama Banque. Les choses sont encore différentes pour le Crédit Mutuel Arkéa et Prêt d’Union, dont le partenariat est capitalistique, la banque détenant 35% de la plateforme de prêts entre particuliers. Autre modèle encore à la Banque Postale, partenaire de KissKissBankBank : l’établissement bancaire finance la moitié de l’objectif de collecte des projets portés par la plateforme de dons. De son côté, BNP Paribas, comme le Crédit Coopératif, est partenaire de Wiseed, mais dans une logique totalement différente. La banque, par l’intermédiaire de sa cellule de veille technologique l’Atelier BNP Paribas, participe à la sélection des porteurs de projets, ce qui lui permet d’identifier très tôt des innovations susceptibles de l’intéresser.

Complémentaires plutôt que concurrents, alors, le crowdfunding et les banques ? Stéphanie Savel en est convaincue :

« ll existe un vrai problème de financement des jeunes entreprises innovantes, en France. Comme elle disposent rarement de trois années de bilan, leur accès au crédit bancaire est extrêmement difficile. La recherche de fonds propres est également compliquée pour ces entreprises. Le crowdfunding représente donc un moyen de financement alternatif pour ces dernières, et il fait levier puisqu’il leur permet par exemple de réunir l’apport nécessaire à l’obtention d’un crédit bancaire. »

Il est vrai que le marché du crowdfunding, qui avait déjà triplé en France en 2013, à 78 millions d’euros, pourrait avoir atteint 120 à 150 millions d’euros en 2014, selon certains acteurs du secteur. Qui estiment que l’essor du financement participatif pourrait permettre aux PME françaises de disposer de 2 milliards d’euros d’ici à 2020.