Relever les défis écologiques, économiques et sociaux dans les territoires, grâce aux capacités financières et aux compétences humaines des acteurs locaux, c’est ce que le Collectif « Territoires et financements innovants »* entend accompagner.

 

En cette période inédite de crise sanitaire et économique, les soutiens financiers au monde économique, menés à l’échelle régionale, nationale et européenne, sont précieux et nécessaires. Cependant, nos territoires, ce sont aussi des acteurs, des compétences et des ressources qu’il faut valoriser dans les différents dispositifs pour contribuer pleinement à la relance et aux transitions.

Dès le début de la crise sanitaire, les acteurs locaux (citoyens, acteurs du développement économique, associations, etc.) ont démontré leurs capacités à se mobiliser par divers moyens : campagnes de crowdfunding pour collecter des dons à destination du personnel de santé, des hôpitaux ou des familles affectées par la maladie, consommateurs mobilisés pour leurs commerçants, développement des circuits courts, sans compter les élans de solidarité entre habitants, commerçants, institutions…

Faire confiance aux acteurs économiques locaux et valoriser, accompagner, et dupliquer leurs initiatives est notre priorité.

Il est aujourd’hui impérieux d’orienter l’épargne des citoyens, plus abondante que jamais, dans les territoires, pour qu’elle accompagne les entreprises et projets locaux[1]. Les plateformes de financement participatif et les réseaux de Business Angels déployés sur l’ensemble du territoire national sont pour cela des acteurs efficaces. Le financement participatif notamment, permet à tous de participer de manière transparente à la relance en finançant un projet identifié et choisi sur une plateforme dédié. Pour amplifier et faciliter cette opportunité, les moyens sont nombreux :

  • intégrer ces acteurs dans les dispositifs du Plan de relance, tels que le label « France Relance », pour en accroître la reconnaissance, et s’appuyer sur ces outils de financement agiles et de proximité ;
  • inciter davantage les particuliers à investir dans les TPE et PME, via des mécanismes fiscaux (à titre d’exemple, au Royaume-Uni l’investissement dans les PME innovantes est défiscalisé à hauteur de 50%), des abondements, des garanties ou via les fonds d’investissements citoyens (exemple : “Herrikoa” au Pays Basque) ;
  • inviter les collectivités à s’emparer du financement participatif comme outils de valorisation des initiatives locales, et pour accompagner les entreprises et porteurs de projet dans leurs recherches de financement (les initiatives « Coup de pouce » en Corrèze, ou « Un projet, un coup de main » en Ardèche en sont de beaux exemples).

Développer et encourager les formes d’échanges locales et les circuits courts est un enjeu fort. Différents leviers sont possibles :

  • privilégier l’achat chez les producteurs locaux de la part des grands opérateurs publics et privés, ce qui suppose une adaptation du code des marchés publics, mais également une formation des acheteurs, tout comme la simple et pure interdiction d’achat de produits importés non équitables ;
  • compléter les Plans climat air énergie territoriaux par des plans carbone territoriaux (exemple de La Rochelle) qui responsabilisent et accompagnent chaque catégorie d’acteurs et permettent des résultats plus tangibles que les marchés carbone mondiaux ;
  • accompagner le développement des tiers-lieux et l’ouverture à leur écosystème territorial (2 200 espaces de valorisation des ressources locales et d’interactions en France) et inciter au télétravail en milieu rural ou périurbain ;
  • territorialiser la philanthropie afin de mieux cerner et servir les priorités pour renforcer la pertinence du mécénat et donner tout son sens au soutien national par la fiscalité ;
  • porter attention aux technologies financières (“fintechs”) et autres acteurs du numérique qui apportent des solutions innovantes (affacturage, outils de pilotage financier, plateforme pour l’obtention d’aides, troc, crowdsourcing…). Ces outils peuvent être proposés directement aux entreprises ou via des partenariats avec les acteurs publics tels que les collectivités territoriales. A titre d’exemple, France Barter (plateforme B2B permettant aux TPE/PME d’échanger des marchandises et services sans sortie de trésorerie) a implanté en ce début d’année 2021 sa plateforme d’échange pour l’agglomération Seine Eure afin de dynamiser les échanges économiques sur son territoire.

Accompagner le tissu économique local pour mieux rebondir est pour nous une nécessité. Le changement de paradigme n’est plus une option.

Les travaux de recherche confortent ces orientations. Michael H. SHUMAN[2], économiste américain, spécialiste de l’économie locale, met en évidence les avantages pour les territoires des “entreprises locales” (celles qui sont financées et dirigées localement). Une étude de l’université de Kassel montre qu’un investissement peut être jusqu’à huit fois plus riche en retombées locales de moyen terme, s’il se réalise en mobilisant les ressources (épargne) et acteurs locaux (entreprises). Les travaux récents relatifs au « métabolisme territorial » (Sabine BARLES[3]), à “l’effet multiplicateur local” responsable d’un tiers des écarts de revenus entre territoires, à « l’empreinte économique locale des banques » (Cabinet Utopies[4]) constituent des supports pédagogiques puissants pour une nouvelle culture des ressources, territoriale, globale et systémique.

Un cadre réglementaire stable et une ingénierie compétente, et surtout un engagement politique fort de la puissance publique serviront indéniablement l’engagement financier local des habitants et les échanges locaux. Ils sont propices à l’émergence et au développement des projets, à la résilience, à la transition écologique, aux relations sociales, aux accomplissements personnels, aux coopérations territoriales et aux transformations des comportements.

Notre Collectif en appelle à faire confiance aux acteurs locaux, à la responsabilité politique et à un engagement collectif, pour surmonter cette crise écologique, économique et sociale. Il faut pour cela intégrer les acteurs des territoires dans les concertations des dispositifs de relance. Nous avons les solutions, saisissons-les !

 

[Télécharger le communiqué de presse]

 

* Le Collectif « Territoires & financements innovants » est composé (par ordre alphabétique) de l’Agence France Locale, Alliance Sens & Economie, l’Association Française des Fundraisers, l’Association Nationale des Pôles territoriaux et des Pays, le Cabinet Utopies, Financement Participatif France, France Angels, France Barter, le Pôle de compétitivité Finance Innovation, Réseau national de l’économie territoriale, Territoires à Énergie Positive (TEPOS) et l’Union nationale des Acteurs du Développement Local.

 

[1] On rappelle que l’épargne « fuit » les territoires, et de plus en plus nettement, c’est le cas à l’échelle nationale, avec 44 % de “fuite”, contre 29 % il y a 20 ans (données : Banque de France).

[2] Les travaux de Michael H. SHUMAN sont présentés dans Raphaël Souchier, « L’après-Wall Street sera local », éditions Actes Sud / Colibris, collection Domaine du possible (janvier 2013).

[3] Sabine BARLES : www.citego.org/bdf_fiche-document-1172_fr.html   

[4] Cabinet Utopies : www.utopies.com